Le projet de réforme des retraites adopté par l'Assemblée

Le projet de loi portant réforme des retraites a été adopté à l'issue d'un scrutin public, mercredi 27 octobre 2010 après-midi : 336 députés ont voté "pour", 233 députés ont voté "contre" et 5 députés se sont abstenus.

Préalablement à ce vote, Jean LEONETTI a souhaité prononcer en séance, lors des explications de vote sur le projet de loi sur les retraites, l'intervention suivante :

"Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes Chers Collègues,

Dans quelques instants, nous allons voter la réforme des retraites après plus de soixante cinq heures de débat à l'Assemblée nationale, cente quarante cinq heures de débat au Sénat et à la suite des conclusions de la commission mixte paritaire.

Quand je dis "nous", c'est bien sûr la majorité présidentielle de l'UMP et du Nouveau Centre, mais en même temps, cela constituera la décision du parlement français, et cette loi deviendra alors, après promulgation, la loi de la République.

Pour ma part, je reste persuadé que cette réforme n'est, ni de droite, ni de gauche, car elle a pour but de préserver notre système de retraite par répartition, qui est la base de notre solidarité entre les générations.

Je reste persuadé que nous aurions pu, que nous aurions dû avoir une large majorité pour adopter ces mesures car cela n'est à nos yeux ni la victoire de la majorité sur l'opposition, ni la victoire du Parlement dur la rue, ni une victoire du gouvernement sur les syndicats, c'est la victoire de l'intérêt général.

Cette victoire, nous aurions pu la construire et la partager en nous donnant un rendez-vous de lucidité, de courage et de responsabilité.

Le rendez-vous de lucidité nous aurait permis de constater que la durée de vie de nos concitoyens s'allonge, comme le prouve une fois de plus aujourd'hui le rapport de l'INSEE et que dans les choix que nous avions, de diminuer les pensions, d'augmenter les cotisations ou d'allonger le temps de travail, la sagesse consistait à choisir la 3ème, qui est celle que tous les pays européens ont adoptée bien avant nous, et bien au delà des deux années supplémentaires proposées.

Ainsi, de l'Allemagne à l'Espagne, de l'Autriche à l'Angleterre et de la Suède à l'Italie, tous les pays européens affichent une durée de temps de travail, et quelque soit leurs orientations politiques, plus proche de soixante six que de soixante deux ans.

Le deuxième rendez-vous qui était nécessaire était le rendez-vous du courage. Il est plus facile de donner à tous que de demander un effort à chacun, il est plus facile d'écrire ou de commander des rapports que de les mettre en application. A ce rendez-vous, la gauche a toujours été absente : en 1993, en 2003, en 2007 et en 2010.

Vous faites écrire des rapports, nous les mettons en oeuvre.

Le rendez-vous du courage est aussi un rendez-vous de vérité. Qui peut croire que le modèle français pouvait, par je ne sais quel miracle, échapper aux décisions difficiles dans un monde économique ouvert et pendant un période de crise.

La gauche a choisi d'étouffer les voix de la raison, de Michel ROCARD à Dominique STRAUSS-KAHN, allant même jusqu'à prétendre que le rapport du FMI qui préconisait l'allongement du temps de travail à 62 ans n'engageait pas son président.

Martine AUBRY est elle-même vite revenu de son imprudente expression de vérité pour se réfugier dans la pensée unique de la gauche, figée sur le tabou de la retraite à 60 ans.

Le mensonge est allé jusqu'à expliquer à la jeunesse que l'on se battait pour elle, pour construire un monde nouveau, alors que l'on se battait contre elle, pour conserver un monde ancien, et lui faire payer demain notre égoïsme présent.

Vous avez donc, en refusant avec les syndicats de discuter des mesures d'âge, empêché un dialogue constructif. Et seuls nous avons décidé des mesures sociales sur la pénibilité, les carrières longues, les handicapés, les mères de famille. Vous vous êtes arc-bouté sur la seule idée qu'il fallait retirer le projet gouvernemental, qlors que vous saviez que ce n'était ni politiquement possible, ni socialement souhaitable.

Ayant en fait autant de projets que d'ambitions personnelles et des divisions au sein de l'opposition, vous aves choisi l'affrontement. Vous avez incité les jeunes à manifester au risque de les exposer à la violence, espéré bloquer le pays au risque de fragiliser une économie convalescente, choisi des attaques personnelles contre le ministre chargé du dossier, puis contre le Président de la République, dans une attitude qui vous tient désormais de programme.

En fait, certains analysent la crise, comme un simple avatar de l'histoire économique qui se répète à intervalles réguliers. Ils n'ont pas compris que rien ne reviendra comme avant, qu'un monde nouveau est à construire, plus responsable et plus juste, qu'il doit se faire dans une démocratie moderne et apaisée. Nos concitoyens n'ont pas besoin de vendeurs de rêves, mais de créateurs d'espoir.

Il faut désormais tourner le dos à ces séquences d'un autre âge où la contestation de la rue suit immanquablement le dialogue possible et cherche à déstabiliser par la force la légitimité des urnes.

Les syndicats ont déjà anticipé ce nouveau dialogue social, proposant avec responsabilité de nouvelles rencontres sur l'emploi des jeunes et des seniors. La majorité sera au rendez-vous.

Cette nouvelle société doit plus s'attacher à repenser le rapport de l'individu au travail et plutôt que travailler moins, il faut travailler mieux. Plutôt que de se combattre, nous devons nous unir pour construire ce monde nouveau, même et surtout dans un contexte difficile. C'est notre honneur et notre responsabilité. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP votera cette réforme des retraites progressive, équilibrée et indispensable pour préserver notre solidarité entre les générations."