Intervention de François CALVET au Sénat
François Calvet est intervenu, ce mardi 10 juillet, en séance au Sénat sur le projet de loi socialiste relatif à l’abrogation de la majoration des droits à construire.
A cette occasion il a défendu la position de l’ancien gouvernement sur la majoration des 30% des droits à construire en ces termes :
"Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Mes chers collègues,
La crise, depuis 2007, a lourdement frappé l’immobilier. Entre mars et mai 2012 le nombre de mises en chantier de logements neufs a plongé de 20 % comparé à la même période de 2011. C’est pourquoi, dans un contexte de fort ralentissement de la construction, le principe de ne laisser aucune chance à la loi sur la majoration des droits à construire est une erreur.
Sur l’action menée, vous me permettrez, mes chers collègues, de rappeler les différentes mesures législatives qui ont permis à notre pays de résister mieux que nos voisins européens. Je voudrais rappeler que, depuis 2005, mais aussi pendant tout le quinquennat du Président Nicolas Sarkozy, un plan massif de soutien à la construction a été mis en œuvre. Sa décision de faire du logement une grande cause nationale, a été totalement respectée.
Cette action, sans précédent s’est traduite par la loi de cohésion sociale de 2005, l’engagement national pour le logement de 2006, la loi de mobilisation pour le logement de 2009, le volet urbanisme de la loi Grenelle 2 de 2010, et la loi de majoration des droits à construire du 20 mars 2012, auxquels s’ajoutent l’ensemble des mesures fiscales adoptées à l’occasion des lois de finances.
100.000 logements sociaux ont été en moyenne financés chaque année grâce à l’effort massif des collectivités locales, des bailleurs sociaux et de l’Etat – 120.000 en 2009 et 130.000 en 2010, record absolu depuis trente ans, et 120.000 en 2011, même objectif pour cette année 2012. Alors que lorsque la Gauche était au pouvoir, elle n’en a jamais construit plus de 40.000 par an.
Madame la Ministre, votre objectif est de construire 150.000 logements sociaux 500 000 logements par an. C’est un objectif très ambitieux, mais je crains plutôt que ce ne soit qu’un bel effet d’annonce.
Mais revenons au projet de loi qui nous rassemble aujourd’hui dans cet hémicycle. Vous voulez abroger la loi du 20 mars 2012 relative à la majoration des droits à construire, avant même son entrée en vigueur. C’est une première ! Surtout que vous ne proposez aucune alternative permettant de répondre à ces enjeux.
Rappelons les enjeux de cette loi qui facilite ainsi l’agrandissement de logements existants et la production de nouveaux logements.
Prenons un exemple, à taille humaine, du bonus de Coefficient d’occupation des sols (COS).
Imaginons une famille, sur un terrain de 250 m², dont le règlement prévoit un COS maximal de 0,4. Elle peut donc construire jusqu'à 100 m². Puis, avec la majoration de 30 %, la constructibilité passe à 130 m². En fin de compte, cette famille a gagné 30 m2 et peut faire deux pièces en plus. Ce n’est pas négligeable quand une famille s’agrandit. De nombreuses familles n’ont pas les moyens ou ne souhaitent pas déménager. En revanche elles ont souvent besoin d’agrandir leur espace de vie.
Le Groupe socialiste craint que cette loi ne fasse s’envoler les prix. Jouer sur la constructibilité d’un même espace est donc un levier simple et une solution – partielle certes, mais efficace – à l’envolée des prix du logement dans les zones dites « denses ».
Cette loi s’inscrit, de plus, dans les objectifs définis par le Grenelle de l’environnement, dont la partie « urbanisme » appelle à consommer moins d’espaces agricoles et naturels.
Dans nos régions de soleil, le grignotage des terres agricoles devient un vrai problème et leur disparition au profit de l’urbanisation n’est pas une solution pour répondre à la demande de logements. On ne peut, d’un côté, s’engager pour lutter contre la consommation d’espaces naturels et regretter la disparition, tous les 10 ans, de l’équivalent d’un département en espace agricole, et d’un autre côté revenir sur une loi de densification. Ce n’est pas cohérent. Or nous l’avons compris, il faut produire plus de logements tout en luttant contre l’étalement urbain. Il est donc nécessaire de renforcer la densité des zones urbaines .
En outre, le bonus d’emprise au sol est un moyen de lutter contre les fuites thermiques et le gaspillage énergétique.
Tout ceci s’inscrit donc dans la logique de la loi dite Grenelle 2 de juillet 2010 qui met en application les engagements de la loi Grenelle 1. Voilà pourquoi cette mesure transitoire, qui doit prendre fin le 31 décembre 2015, est tout à fait cohérente.
Par ailleurs, le prix de sortie au m2 ne sera pas augmenté. et sera sans effet sur les prix de l’immobilier. Le raisonnement du Groupe Socialiste est spécieux.
En outre, l’industrie du bâtiment possède l’avantage de ne pas être délocalisable. Elle est en lien avec de nombreux autres secteurs, comme le BTP. Pour chaque logement construit, nous savons qu’il engendre la création d’un emploi et demi.
Enfin, il n’est pas négligeable de souligner que cette loi n’implique aucun engagement financier pour l’Etat et sera même positive au niveau budgétaire dans un moment où la crise économique nous appelle à réduire nos déficits.
Depuis la loi Boutin, trois dispositifs prévoient déjà, avec justesse, une majoration des droits à construire : de 50% pour le logement social, qui doit rester une priorité ; de 30% pour le logement basse consommation, que nous devons encourager ; et de 20% en application de ladite loi Molle.
La loi de 2012 ne correspond en aucun cas à une redondance avec celle de 2009, mais bien à un approfondissement. La loi du 20 mars 2012 introduit un nouvel article L.123-1-11-1 dans le code de l’urbanisme, qui majore de 30%, et pour trois ans, les règles de constructibilité dans les communes couvertes par un Plan d’occupation des sols (POS), un Plan local d’urbanisme (PLU) ou un Plan d’aménagement de zone (PAZ).
Après ces années de crise, le contexte n’est plus le même. La loi du 20 mars 2012 propose de passer d’un système où les communes peuvent décider d’appliquer la majoration, à un système où elles ont le droit de refuser de l’appliquer. Inverser la logique génère une meilleure information des habitants à propos de leurs droits. Il s’agit de faire un rappel des possibilités offertes – car trop peu utilisées, voire même oubliées - et de favoriser un cadre plus incitatif.
Je tiens également à réaffirmer que cette loi n’a été pensée, ni ne doit être perçue, comme une attaque au principe constitutionnel « de libre administration des collectivités territoriales », tel que le Groupe socialiste semble vouloir l’insinuer. Bien au contraire, les communes ont le choix et la possibilité de ne pas appliquer la majoration des droits à construire, si elles estiment cela plus approprié dans leur cas.
Une commune peut également décider de n’appliquer qu’une partie des 30% – 10 ou 20% par exemple. De plus le conseil municipal peut, s'il l'accepte sur la totalité de la commune, ou seulement sur certains secteurs, adopter une délibération mettant fin à l'application de la majoration des droits à construire, dans le délai de validité de la loi. De tout cela résulte la confirmation de la totale maîtrise de leur développement par les collectivités territoriales.
Certains évoquent, par ailleurs, « une contrainte temporelle ». Cependant, il nous semble que six mois est un délai suffisant pour produire une note d’information et prendre une délibération contraire.
La loi prévoit, en effet, une participation du public, à travers la mise à disposition d’une note d’information sur son application au territoire de la commune ou de l’EPCI, le recueil des observations du public. Il est important que les habitants soient informés de ce qui les concerne. L’intercommunalité n’est pas non plus mise à mal puisque cette délibération contraire peut être rendue à l’échelle d’un EPCI. Il est par ailleurs prévu que l’application de la loi soit pensée en accord avec les SCOT et n’aille donc pas à l’encontre de la cohérence d’une zone.
Pour conclure mon propos, je dirai qu’il ne nous semble pas pertinent d’abroger la loi du 20 mars 2012, avant même son entrée en vigueur, en estimant à l’avance, et de manière arbitraire, qu’elle serait inefficace, inapplicable ou source de contentieux. Comment mesurer alors son impact et son efficacité ? Comment mesurer les effets de la loi sur le terrain si on la tue dans l’œuf ? Ne devrait-on pas laisser une chance à cette loi en l’absence de proposition alternative pour accroître l’offre de logements.
Il serait bien plus intéressant d’en observer les retombées dans trois ans, ainsi que le texte le prévoit.
L’abrogation de cette loi va nous priver d’une opportunité que l’on n’a pas le droit de négliger, particulièrement en cette période de crise. Toutes les solutions doivent être expérimentées.
Voilà les raisons pour lesquelles, avec mes collègues du groupe UMP, nous nous opposons à l’abrogation de la loi du 20 mars 2012 relative à la majoration des droits à construire.
Je vous remercie de votre attention."
Au cours de cette discussion, François Calvet a déposé un amendement visant à supprimer l’article unique de la proposition de loi visant à abroger la loi relative à la majoration des droits à construire en exposant les motifs suivants :
"Nous nous accordons tous pour reconnaître qu’un important effort de construction est nécessaire en France.
Et pourtant vous souhaitez supprimer une loi qui est de nature à apporter une contribution intéressante à la résolution de ce problème.
Une loi qui est de nature à répondre à la demande de nombreuses familles qui s’agrandissent et qui ne souhaitent pas quitter leur maison devenue trop petite.
Une loi de densification du milieu urbain de nature à répondre en partie au fléau du grignotage inexorable des terres agricoles.
Une loi qui n’engage pas de dépenses publiques supplémentaires, contrairement aux programmes de production de logements sociaux qui demeurent bien entendu une priorité compte tenu de la demande croissante.
Et vous voulez la supprimer avant même que le dispositif ne soit mis en place. Comment alors pouvoir juger de son efficacité ?
Je voudrais insister sur la nécessité de ne pas se montrer frileux, eu égard à l’importance des besoins non satisfaits en matière de logement, d’autant qu’à ce stade aucune politique volontariste en faveur de la construction de logement ne se dessine.
Tout d’abord, cette loi ne soulève aucune objection de principe, puisqu’il existait déjà des dispositions permettant de majorer les droits à construire permis par le coefficient d’occupation des sols, dans la limite de 20 %.
Porter ce plafond à 30 % ne constitue donc pas un saut dans l’inconnu et rendre le dispositif plus incitatif pour les collectivités est une bonne mesure dans un contexte de crise, dès lors que cette loi respecte le principe constitutionnel de la libre administration des communes.
En effet, contrairement à certaines affirmations, cette loi n’a jamais institué d’obligation : elle prévoit que tout conseil municipal ou organe délibérant d’établissement public de coopération intercommunale peut s’opposer à l’application de la mesure, totalement ou partiellement. Il s’agit d’un verrou tout à fait essentiel.
Enfin, il a été plusieurs fois prétendu que la mise en œuvre de ce dispositif entraînerait une augmentation du coût du logement. C’est méconnaître le fonctionnement du marché du logement : accroître l’offre de logements n’a pas d’effet inflationniste, au contraire.
Bien évidemment, cette loi n’a jamais eu la prétention de régler tous les problèmes de logement, elle pouvait constituer cependant un élan, par une incitation nouvelle, qu’il ne fallait surtout pas négliger.
La loi du 20 mars 2012 a donc une portée à la fois économique et sociale, qui mérite d’être soutenue.
Ce sont les raisons pour lesquelles, avec mes collègues cosignataires de cet amendement, nous souhaitons supprimer Nous nous accordons tous pour reconnaître qu’un important effort de construction est nécessaire en France.
Et pourtant vous souhaitez supprimer une loi qui est de nature à apporter une contribution intéressante à la résolution de ce problème.
Une loi qui est de nature à répondre à la demande de nombreuses familles qui s’agrandissent et qui ne souhaitent pas quitter leur maison devenue trop petite.
Une loi de densification du milieu urbain de nature à répondre en partie au fléau du grignotage inexorable des terres agricoles.
Une loi qui n’engage pas de dépenses publiques supplémentaires, contrairement aux programmes de production de logements sociaux qui demeurent bien entendu une priorité compte tenu de la demande croissante.
Et vous voulez la supprimer avant même que le dispositif ne soit mis en place. Comment alors pouvoir juger de son efficacité ?
Je voudrais insister sur la nécessité de ne pas se montrer frileux, eu égard à l’importance des besoins non satisfaits en matière de logement, d’autant qu’à ce stade aucune politique volontariste en faveur de la construction de logement ne se dessine.
Tout d’abord, cette loi ne soulève aucune objection de principe, puisqu’il existait déjà des dispositions permettant de majorer les droits à construire permis par le coefficient d’occupation des sols, dans la limite de 20 %.
Porter ce plafond à 30 % ne constitue donc pas un saut dans l’inconnu et rendre le dispositif plus incitatif pour les collectivités est une bonne mesure dans un contexte de crise, dès lors que cette loi respecte le principe constitutionnel de la libre administration des communes.
En effet, contrairement à certaines affirmations, cette loi n’a jamais institué d’obligation : elle prévoit que tout conseil municipal ou organe délibérant d’établissement public de coopération intercommunale peut s’opposer à l’application de la mesure, totalement ou partiellement. Il s’agit d’un verrou tout à fait essentiel.
Enfin, il a été plusieurs fois prétendu que la mise en œuvre de ce dispositif entraînerait une augmentation du coût du logement. C’est méconnaître le fonctionnement du marché du logement : accroître l’offre de logements n’a pas d’effet inflationniste, au contraire.
Bien évidemment, cette loi n’a jamais eu la prétention de régler tous les problèmes de logement, elle pouvait constituer cependant un élan, par une incitation nouvelle, qu’il ne fallait surtout pas négliger.
La loi du 20 mars 2012 a donc une portée à la fois économique et sociale, qui mérite d’être soutenue.
Ce sont les raisons pour lesquelles, avec mes collègues cosignataires de cet amendement, nous souhaitons supprimer l’article unique de la proposition de loi visant à abroger la loi relative à la majoration des droits à construire."
Par ailleurs, lors de sa prise de parole, François CALVET a rappelé sa volonté et celle de ses collègues de ne pas s'opposer au vote de l'article 2 de la proposition de loi relative à l'abrogation de la majoration des droits à construire car il vise à maintenir, pour les communes ou leurs groupements, qui ne seraient pas opposés à l'entrée en vigueur de cette majoration, la possibilité d'y mettre fin à tout moment d'ici le 31 décembre 2015. Il n'y a donc aucune nouveauté de cette initiative. Il ne peut être voté contre une telle disposition, qui avait déjà été approuvée lors de l'examen de la loi du 20 mars.
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