Pour un moratoire concernant l'application de la réforme des rythmes scolaires
Les auteurs de la réforme des rythmes scolaires ont cru pouvoir compter sur un consensus quant à son opportunité. Cette illusion leur a laissé présager que la réforme pouvait être menée sans donner le temps aux acteurs de se concerter, et pilotée au niveau national. Elle leur a fait croire qu’ils pourraient, au nom de l’intérêt des élèves, prétendre poursuivre l’amélioration de la performance de notre système éducatif en transformant profondément l’organisation du temps scolaire tout en bannissant la possibilité d’approfondir l’enseignement des savoirs fondamentaux.
En manifestant dès le mois de mars 2013, parents et enseignants signifiaient au ministre que cette réforme n’était pas la priorité dont l’école avait besoin. Ils faisaient part de leurs doutes concernant l’utilité d’un texte qui les obligeait à l’instauration de cours de claquettes ou de beat box, plutôt qu’à l’organisation d’activités visant au renforcement des savoirs fondamentaux. Près d’un élève sur deux entre aujourd’hui au collège sans suffisamment maîtriser la lecture et le calcul. Mais rien n’y a fait et l’homme de « la refondation de l’école » réussissait le tour de force d’imposer le retour de la semaine de quatre jours et demi à toutes les communes de France, en vantant les mérites de cette grande réforme.
Une grande réforme. Par l’ampleur des ressources qu’elle mobilise, c’est incontestable. L’introduction de quelques heures d’enseignement périscolaire a justifié la création d’un fonds étatique doté de 250 millions d’euros et le recours aux caisses nationales d’allocations familiales pour aider les communes. Mais les fonds mis à disposition par l’Etat ne suffiront pas à financer une réforme qui coûtera plus d’un milliard par an aux français. Les 20 000 nouvelles communes qui devront appliquer cette réforme à la rentrée 2014 seront contraintes de solliciter à nouveau le porte-monnaie des contribuables, via une hausse des impôts locaux, pour financer la nouvelle organisation du temps scolaire voulue par le ministre Peillon.
Durant plus d’une année, élus locaux et parlementaires de tous bords ont longuement interpellé le ministre de l’Education nationale pour lui rappeler le niveau de la pression fiscale à laquelle étaient déjà soumis les français et l’appeler à vouloir reporter une réforme qu’ils jugeaient trop gourmande en moyens financiers et trop précipitée pour être efficace.
Les mesures annoncées ces derniers jours par Benoit Hamon sur l’assouplissement de la réforme des rythmes scolaires montrent que la volonté et la ténacité dont on fait preuve les Sénateurs du groupe UMP ont porté leurs fruits. Ils n’ont cessé de dénoncer une réforme qui trop précipitée pourrait avoir des effets plus néfastes que bénéfique pour la santé des élèves ; ils n’ont cessé de dénoncer une réforme qui faute d’articuler les temps scolaires et périscolaires pour apporter une aide aux élèves en grande difficulté scolaire, n’aurait aucun impact sur leur réussite scolaire ; ils n’ont cessé de dénoncer une réforme qui ne prenant pas en compte les spécificités locales était inapplicable et enfin ils n’ont cessé de dénoncer une réforme qui désorganisait profondément l’école et les familles.
Cependant, les mesures annoncées par le nouveau ministre de l’Education nationale sont largement insuffisantes. Rien n’est envisagé pour couvrir les dépenses lourdes engendrées par cette réforme. Les collectivités locales ne pourront faire face simultanément à une diminution sans précédent des dotations aux collectivités locales et à l’augmentation des dépenses induites par la réforme des rythmes scolaires.
En conséquence, les Sénateurs du groupe UMP demandent un moratoire pour la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires tant que l’Etat n’assumera pas clairement la compensation intégrale et pérenne des coûts réels de cette réforme. Face à des français qui vont une nouvelle fois devoir payer, à des enseignants désorientés, des chefs d’établissements désabusés et des parents inquiets, il n’est pas trop tard pour suspendre cette réforme et prendre le temps d’une concertation qui tienne compte véritablement de l’intérêt de l’élève tout en satisfaisant aux impératifs de tous les acteurs. Sans quoi, les maires, tiraillés entre le devoir d’appliquer une réforme qui issue d’un décret n’a pas la force symbolique de la loi et les mécontentements légitimes, de plus en plus véhéments de leurs concitoyens, n’auront d’autres choix que d’exercer leur liberté de conscience.
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